La figue de Barbarie, depuis longtemps marginalisée, vient d’acquérir des qualités extraordinaires, méritant d’être qualifiée de l’or vert, des Ait Baâmrane. Des spécialistes et chercheurs de terrain, vont jusqu’à qualifier le cactus avec les figues de Barbarie de «plante du futur». En effet, selon des études spécifiques en la matière : un hectare de cactus draine à son exploitant «jusqu’à 10.000 DH de bénéfice, contre 3.500 DH pour l’arganier et 1.500 pour les céréales».
La production des figues de Barbarie et du cactus est pionnière dans la région de Sidi Ifni avec Aït Baâmrane comme capitale nationale de ce fruit, manne du ciel, pour une région aride. Le fruit a des propriétés diététiques et esthétiques : confiture, filet de raquette, cosmétique, savon, farine de raquettes de cactus, tisane des fleurs de figues de Barbarie… Et bien sûr le fameux huile de graines de figues de Barbarie, vendu à 12 000 DH le litre, soit l’huile la plus chère au monde.
C’est une aubaine pour les coopératives féminines qui exercent dans le secteur et qui, grâce à des revenus fixes, améliorent leur quotidien, et profitent de la production des dérivés du cactus et des figues de Barbarie, pour bien vendre et bien exploiter cette manne génératrice de revenus. Si l’huile des figues de Barbarie est chère, c’est d’abord qu’il faut 800 kg de figues pour produire 30 kg de graines pour enfin avoir un litre d’huile. En plus, l’huile vient d’acquérir une renommée incroyable en cosmétique avec une demande incessante tant au Maroc qu’à l’étranger.
Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture et de la Pêche maritime, avait inauguré, juillet dernier à Sidi Ifni, une unité de valorisation du cactus. Ce projet, qui s’inscrit dans le cadre du pilier II de la stratégie du Plan Maroc Vert, s’accompagne également d’une convention de soutien pour assurer le bon fonctionnement de cette unité de valorisation, laquelle relie le GIE (groupement d’intérêt économique) du Sabbar Ait Baâmrane à six autres partenaires.
Réalisé pour un montant global de 85 millions DH, ce projet cible 1.200 agriculteurs et devrait permettre le désenclavement des champs de cactus ainsi que le développement économique et l’amélioration des revenus des agriculteurs à travers l’organisation de la filière du cactus. Il tend également à promouvoir, valoriser les produits de base de cactus et renforcer les moyens de conditionnement et de commercialisation. Ainsi, et, grâce à ce nouveau projet, la production devrait passer de 8 t/ha à 10 t/ha.
Les répercussions de cette unité se situent, quant à elles, à plusieurs niveaux. Celle-ci ambitionne, d’une part, à améliorer le revenu des agriculteurs en le faisant passer de 1.600 dh/ha à 2.795 dh/ha et d’autre part, d’accroître la valeur ajoutée de 4.817 DH/ha à 10.310 dh/ha. Erigée sur une superficie de 2.400 m2, cette unité est équipée en chaîne de conditionnement (désépineuse, calibreuse, mezzanine, laveuse des caisses), matériel technique et d’un showroom.
Aït Baâmrane est la capitale des figues de Barbarie avec 50% de la superficie nationale. Un produit de terroir en plein développement socio-économique. Appelé, également, « Aknari » dans la région de Sidi Ifni, en référence références aux Iles Canaries qui ont été pendant des siècles, le verger des productions subtropicales. L’histoire du cactus dans la région d’Aït Baâmrane remonte à plus de 150 ans, selon les habitants qui confirment l’existence du cactus et ses utilisations dans plusieurs domaines, notamment les échanges commerciaux (Troc), l’alimentation de bétail, les délimitations des parcelles ….
Le cactus a des vertus vraiment extraordinaires : présente plusieurs avantages : d’ordre écologique, socio-économique, alimentaire, cosmétique ou encore thérapeutique. En effet, au Maroc, c’est une espèce utilisée comme plante fourragère, pour l’amélioration des parcours, pour la préservation des sols contre l’érosion, la lutte contre la désertification et la conservation de la biodiversité, tout en contribuant à la régénération des espèces végétales spontanées et à la constitution d’un microclimat favorable au développement d’une faune et une flore très diversifiées.
Sur le plan nutritionnel, précise une brillante étude de terrain à laquelle aveint participé le Conseil Régional du Souss-Massa, la DPA de Tiznit et l’INRA Agadir, la figue de Barbarie est l’un des aliments le plus complet et le plus riche en différents nutriments (sels minéraux, vitamines, fibres...). En effet, les fruits peuvent être consommés à l’état frais, congelés, confits ou séchés ou encore transformés en jus, sirop, farine, confiture ou en huile alimentaire de graine.
La culture de figue de Barbarie dans la région d’Ait Baâmrane occupe une superficie de 40.000 hectares, qui augmente chaque année de plus de 4%. On note trois variétés dans la région, classées en deux catégories : Achefri, Aïssa et Moussa. Aïssa pour des figues produites en juin et juillet et Moussa pour des figues produites et disponible du mois d’août au mois de décembre. C’est la variante la plus brisée pour ses couleurs et son goût délicieusement exceptionnel. La culture du figuier de Barbarie est parfaitement incorporée à l’agriculture locale et constitue pour les foyers une source de revenus. Les communes rurales de Sboya et de Mesti sont considérées à ce titre comme la capitale du cactus.
L’abondance de la matière première dans la région peut ouvrir le champ pour une industrialisation et ceci par la valorisation des fruits de figues de Barbarie en plusieurs produits très appréciés par le consommateur. C’est ce qui est en train de se produire, sauf qu’on remarque, ces toutes dernières années, une forte demande sur les productions locales. Une bonne gestion de production s’impose alors et devrait avantager la transformation en matières dérivées (nutrition et cosmique) sur place au lieu de la vente du produit brut, principalement à l’exportation.
Le cactus et les figues de Barbarie doivent être considérés comme un patrimoine naturel à sauvegarder à travers des textes et une réglementation spécifique pour éviter de se trouver devant des situations alarmantes dans lesquelles se trouve l’huile d’argan, exporté par tonnes à l’étranger. Autoriser l’exportation sans limiter la production brute, est un vrai crime économique et social contre toutes les coopératives féminines et les producteurs et une entrave grave au développement socio-économique dans la province de Sidi Ifini, dont les ressources naturelles sont bien limitées et qui risquent de diminuer avec une super exploitation non contrôlée et non réglementée.
Conscient de cet enjeu du cactus et de son importance dans la dynamique économique et sociale, Daha Sidi Saleh, gouverneur de la province de Sidi Ifni, déploie d’importants efforts avec les responsables des services extérieurs, dont Beigui Lahbib, chef de la division de l’action sociale dans la province, afin de valoriser à la fois la production, l’exploitation et la mise en valeur des produits dérivés du cactus et des figues de Barbarie. Une réglementation existe, nous apprend-on du côté des opérateurs à ce sujet, mais malheureusement non respectée. Les Pouvoirs Publics doivent assumer la responsabilité pour faire appliquer la réglementation et les textes, pour la préservation de la ressource, mais aussi reste à signaler que pour mieux faire connaître le cactus et les figues de Barbarie dans la province, se tient le « Moussem Aknari », organisé dans sa deuxième édition en 2015, qui est une opportunité et une bonne vitrine du figuier de Barbarie d’Aït Baâmrane, à travers ses diverses composantes en la matière et ses nombreux intervenants, dont principalement les coopératives féminines.
Le « Moussem Aknari », prévu dans sa 3ème édition du 12 au 14 Août, porte comme thème : « la durabilité des ressources territoriales : choix de développement ». Un thème de grande actualité qui cadre parfaitement avec la problématique vécue actuellement à la fois au sujet de la ressource, comme celui de la production et de la commercialisation des produits du terroir. Le Moussem est supervisé avec passion et implication par son directeur, Beigui Lahbib, qui s’investit pour la valorisation des produits avec dynamisme et concertation avec les intéressés au niveau d’Aknari, comme au niveau du miel ou huile d’argane…
L’Aknari des Aït Baâmrane, rappelons-le, est, en effet, l’une des espèces la plus réputée pour sa qualité et son goût et mettre en exergue l’apport de cette plante en tant que source de revenu pour une bonne partie de la population rurale de cette jeune province. Un grand potentiel qui a encore un bon avenir à conditions qu’on y mette tous les ingrédients rationnels, de savoir-faire et de marketing… et de facteur déterminant comme levier de développement socio-économique, oh combien nécessaire, dans la zone.
Très bonne continuation.
(http://www.lopinion.ma/def.asp?codelangue=23&id_info=51651)
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